La prime d’internat peut se cumuler intégralement avec les indemnités pour travail de nuit.

C’est une jurisprudence certes relativement ancienne (Arrêt de la cour de cassation du 16 nov. 2004, pourvoi no 03-42.297), mais jamais contredite que nous abordons ici et relative à un cumul d’indemnités. LA CCN 51 prévoit de nombreuse primes de sujétion au point que pour certaines d’entre elles, elles sont susceptibles d’entrer en conflit quant à leur régime indemnitaire.

Les faits

Dans cette affaire, des infirmières, aides-soignants et auxiliaires de puériculture travaillant au sein d’un hôpital accueillant des enfants polyhandicapés estimaient qu’en sus de leur indemnité de nuit, elle remplissaient les conditions posées à l’article A 3.4.4.1 de l’annexe III de la convention collective pour bénéficier de la prime d’internat. Il a lieu de préciser que les salariés travaillaient plus de trois fois par mois au delà de 20 heures ainsi que le dimanche et les jours fériés, et assuraient de temps à autre une surveillance nocturne.

Si le juge du fond donnait partiellement raison aux salariés qui intervenaient à la fois dans des secteurs médico-social et sanitaire de l’établissement, il estimait qu’un principe de proportion devait s’appliquer selon le temps de travail exercé dans chacune des structures. Ce principe de proportion était alors applicable sur la prime d’internat se fondant sur l’argument que la convention collective ne fixait aucune règle dans cette hypothèse.

La règle posée par la Cour de cassation

La Cour de cassation ne reçoit pas cet argument et casse l’arrêt de la Cour d’appel selon sa conclusion suivante : « en statuant ainsi, alors que la prime d’internat est due intégralement aux salariés des établissements pour enfants ou adultes handicapés remplissant les conditions prévues par l’article A 3.4.4.1 de l’annexe III de la Convention collective (…), indépendamment de leur droit aux indemnités pour travail de nuit applicables selon l’article A 3.2 à tous les salariés relevant de la convention collective quel que soit leur secteur d’activité (…), la cour d’appel a violé les dispositions susvisées ».

L’interprétation de cet arrêt est relativement simple. En effet, la cour de cassation dissocie les deux sujétions, d’un part celle lié à des contraintes cumulées de l’internat dans un cadre mensuel et d’autre part celle de nuit qui a un cadre temporaire réduit à une séquence de travail unique. Dés lors, les sujétions n’ayant pas le même cadre, les contreparties financières respectives sont logiquement cumulables

Les textes de référence de la CCN 51

Article A 3.4.4.1. devenu A3.4.2.1. Prime d’internat de 5 % dans les établissements pour enfants ou adultes handicapés ou inadaptés (extrait) : « La prime d’internat est attribuée aux personnels subissant dans le mois considéré au moins trois contraintes parmi celles énoncées ci-dessous :

  • – surveillance de nuit (responsabilité de surveillance nocturne),
  • – travail le dimanche ou les jours fériés,
  • – travail effectué au-delà de 20 heures ».

A 3.2.1. Indemnité pour travail de nuit. Agents assurant un service normal : « Les salariés qui assurent totalement ou partiellement leur service normal entre 21 heures et 6 heures et ce pendant cinq heures au moins percevront une indemnité égale par nuit à (…) ».

 

Références

Cour de cassation
chambre sociale
Audience publique du mardi 16 novembre 2004
N° de pourvoi: 03-42297
Publié au bulletin Cassation.

M. Texier, conseiller le plus ancien faisant fonction., président
Mme Grivel., conseiller rapporteur
M. Collomp., avocat général
la SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez, la SCP Gatineau., avocat(s)

 

Texte intégral

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l’arrêt suivant :

Vu la connexité, joint les pourvois n° 03-42.297 à T 03-42.302 ;

Sur le moyen unique des pourvois principaux :

Vu les articles A 3.4.4.1, A 3.2.2 et 5.04.2 de la Convention collective nationale des établissements privés d’hospitalisation, de soins, de cure et de garde à but non lucratif du 31 octobre 1951 ;

Attendu, selon l’arrêt attaqué, que Mme X… et plusieurs autres salariés de l’association Saint-François d’Assise, employés comme infirmières, aides-soignants ou auxiliaires de puériculture, ont été affectés au service polyhandicapés de l’hôpital d’enfants de Saint-Denis, dans lequel ils travaillent plus de trois fois par mois au delà de 20 heures ainsi que le dimanche et les jours fériés, et assurent de temps à autre une surveillance nocturne ; qu’ils ont saisi la juridiction prud’homale d’une demande de rappel de salaire au titre de la prime d’internat prévue par l’article A 3.4.4.1 de l’annexe III de la Convention collective nationale des établissements privés d’hospitalisation, de soins, de cure et de garde à but non lucratif du 31 octobre 1951 dite FEHAP ;

Attendu que pour débouter les salariés partiellement de leurs demandes, l’arrêt relève que la convention collective nationale du 31 octobre 1951 applicable prévoit des modalités différentes de rémunération des sujétions selon le secteur considéré, que son avenant n° 92-03 du 17 mars 1992 prévoit ainsi, pour le secteur médico-social uniquement, une prime d’internat égale à 5 % du salaire indiciaire pour les personnels subissant, dans le mois considéré, trois contraintes parmi celles de surveillance de nuit, de travail le dimanche ou les jours fériés et de travail effectué au-delà de 20 heures, et que d’autres dispositions s’appliquent au secteur sanitaire (articles A. 3.2.2 et 05.4.2 : 151,67 heures rémunérées 169, indemnités pour travail de nuit) ; que les salariés intervenant concurremment dans les deux secteurs médico-social et sanitaire sans que la convention collective ne fixe de règle dans cette hypothèse, il convient de les faire bénéficier des dispositions applicables au secteur sanitaire et au secteur médico-social en fonction du temps consacré à chacun d’eux ;

Qu’en statuant ainsi, alors que la prime d’internat est due intégralement aux salariés des établissements pour enfants ou adultes handicapés remplissant les conditions prévues par l’article A 3.4.4.1 de l’annexe III de la Convention collective des établissements privés d’hospitalisation, de soins, de cure et de garde à but non lucratif, indépendamment de leur droit aux indemnités pour travail de nuit applicables selon l’article A 3.2 à tous les salariés relevant de la convention collective quel que soit leur secteur d’activité ou de la réduction de leur temps de travail prévue par l’article 05.04.2 pour les personnels des établissements sanitaires dont le travail s’effectue en totalité la nuit, la cour d’appel a violé les dispositions susvisées ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu’il y ait lieu de statuer sur le pourvoi incident de l’association,

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le 10 décembre 2002, entre les parties, par la cour d’appel de Saint-Denis-de-la-Réunion ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Saint-Denis-de-la-Réunion, autrement composée ;

Condamne l’association Saint-François d’Assises aux dépens ;

Vu l’article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne l’association Saint-François d’Assises à payer à l’ensemble des défendeurs la somme de 2 500 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l’arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du seize novembre deux mille quatre.