Main basse sur l’argent de la formation professionnelle

La loi sur la formation professionnelle du 5 septembre 2018 dite « pour la liberté́ de choisir son avenir professionnel » a bouleversé le champ décisionnel de la formation professionnelle et son corollaire, les circuits de financements. Pour mémoire les principes directeurs de la réforme se structurent comme suit. 

  • Perception des cotisations patronales du secteur par les URSSAF (perçu par UNIFAF auparavant sur le secteur du sanitaire et social à but non lucratif)
  • Disparition du Congé individuel de formation (CIF) remplacé par un « Compte personnel de formation de transition » (financement beaucoup moins important donc beaucoup plus de difficultés pour obtenir une formation reconversion)
  • Création d’un autorité administrative, FRANCE COMPETENCE, qui va gérer et flécher les fonds de la formation professionnelle
  • La transformation des OPCA (Organisme paritaire Collecteur agrée) en OPCO (Opérateur de Compétence).Il n’échappera pas aux analystes avertis qu’entre OPCA (Organisme Paritaire collecteur agrée) et OPCO (Opérateur de compétence) le mot paritarisme a disparu. Toutefois, le paritarisme subsiste.
  • Un Compte Personnel de Formation CPF non plus comptabilisé en heures mais en euros et gérés par la Caisse des Dépôts.
  • La mise en œuvre des CEP (Conseil en Évolution Professionnelle) sera confié à des entreprises privées agrées par France COMPETENCE
  • Une dotation (plus importante) du PIC – formation des demandeurs d’emploi.
  • Le plan de formation devient le plan de développement des compétences
  • Suppression la période de professionnalisation remplacée par un nouveau dispositif de « reconversion ou promotion par alternance » Pro A 

Les cotisations redirigées vers la formation des demandeurs d’emploi

Les arbitrages financiers pour 2019 ont été publié par décret et ne laissent guère de doute sur l’esprit de cette loi : Une captation des fonds de la formation professionnelle au profit de la formation des demandeurs d’emploi.

Alors qu’auparavant les quelques 1 à 2 % de la masse salariale brute cotisée par les employeurs était perçus et gérés par les OPCA, désormais France Compétence s’interpose 

Pour 2019 les quelques 80% de l’acompte de la contribution à la formation seront réparties comme suit :

  • 1,5 Milliards d’euros pour la formation des demandeurs d’emploi
  • 1,3 milliard d’euro pour la formation de salariés (dont 4,2% pour le CEP, 39% pour le CPF de transition, 2,7% pour le CPF, 41,7% pour l’alternance, 10, 7% pour les plans de formation des TPE PME de – de 50 salariés, 1,7% frais de fonctionnement de France Compétence).

Alors que le principe qui a longtemps prévalu, de la séparation entre les politiques publiques financées par l’impôt et l’autonomie du champ économique et social financée par de la cotisation sociale, le gouvernement brise avec violence ce principe pour s’accaparer la majeure partie de l’argent de la formation professionnelle géré par les partenaires sociaux et la rediriger sur les demandeurs d’emplois. Croyant de manière doctrinaire que dynamiser le marché de l’emploi passe obligatoirement par la formation des demandeurs d’emploi, il est procédé à une ponction majeure sur l’argent de la formation professionnelle. Les victimes ? les salariés et les employeurs du secteur privé : Les employeurs, qui auparavant pouvait financer leur plan de formation sur les retours de l’OPCA (Compte investissement formation) devront, s’ils veulent maintenir le niveau d’investissement formation, mettre la main à la poche faute de retour de financement. Ensuite, les salariés qui, du fait de la raréfaction des financements, verront l’accès à la formation, et donc un maintien de leurs compétences, significativement perturbé.