Jours fériés et CCN51

Le principe après application de l’avenant (décision patronale) du 2 décembre 2012

Les modifications de convention collective donnent lieu à des situations complexes notamment en ce qui concerne les avantages individuels acquis des salariés (appelés également avantages contractuels). En effet, si la convention rénovée prévoit leur suppression, ceux-ci doivent être maintenus pour les salariés présent dans l’entreprises avant la date d’entrée en vigueur de la nouvelle convention ou de l’avenant prévoyant sa suppression. Les jours fériés non travaillés et donnant droit à des repos compensateurs sont considérés comme des avantages individuels acquis pour les salariés présents dans l’entreprise avant l’entrée en vigueur de la recommandation patronale du 4 septembre 2012 applicable au 2 décembre 2012 et qui notamment prévoit de les supprimer.

La question se posait également pour les salariés à temps partiel qui sont de repos du fait de leur temps partiel. Doivent-ils bénéficier du repos compensateur au titre du jour férié ?

La cour d’appel de Lyon a répondu par l’affirmative.

La décision de justice

Cour d’appel de Lyon, Chambre sociale B, Arrêt du 3 décembre 2014, Répertoire général no 13/05890

(Extrait)

Sur la demande tendant à l’octroi de jours de repos compensateurs, au titre des jours fériés des 14 juillet 2010, 1er mai, 8 mai, 25 décembre 2013 et 1er janvier 2014 :

Attendu que Franck X… fonde cette demande sur les dispositions des articles 11.01.3.1 à 11.01.3.3 de la convention collective ;

Attendu que la FEHAP a dénoncé par lettre du 31 août 2011, certaines dispositions de cette convention, notamment celles relatives aux jours fériés ; que le préavis de cette dénonciation partielle ayant expiré le 1er décembre 2011, les points dénoncés ont survécu jusqu’au 1er décembre 2012 ;

Attendu que Franck X… demande à la cour de déclarer nulle cette dénonciation partielle, motifs pris de ce que la convention collective ne prévoit pas les stipulations qui peuvent faire l’objet d’une telle dénonciation ;

Mais attendu qu’aucune convention ou accord collectif ne s’étant substitué aux stipulations dénoncées dans le délai d’un an à compter du 1er décembre 2011, Franck X…, en vertu des articles L.2261‐13 du code du travail et 1.06.1 de la convention collective, a conservé le bénéfice des avantages individuels qu’ils avaient acquis en application des articles 11.01.3.1 à 11.01.3.3 dénoncés, et qui doivent ainsi être considérés comme des avantages intégrés à son contrat de travail ;

que la F.C.E.S ne conteste pas l’allégation de Franck X… selon laquelle jusqu’au mois de décembre 2005, le C.M.A a fait bénéficier les salariés à temps partiel d’un jour de repos compensateur pour tout jour férié coïncidant avec un jour non travaillé ; qu’il y a lieu d’en déduire que l’octroi de ce jour de repos compensateur correspondait à un droit déjà ouvert et non simplement éventuel ;

que Franck X… étant dès lors en mesure, pour justifier de sa demande d’octroi de jours de repos compensateur, d’invoquer l’application des dispositions des articles 11.01.3.1 à 11.01.3.3 de la convention collective, intégrées dans son contrat de travail, il est sans intérêt à exercer une action tendant à l’annulation de la dénonciation de ces dispositions, ce dont il résulte que ce chef de sa demande est irrecevable ;

Attendu que Franck X…, pour justifier de sa demande tendant à l’octroi de jours de repos compensateur au titre des jours fériés, expose que le C.M.A, a tiré prétexte de l’accord collectif relatif à l’aménagement et à la réduction du temps de travail conclu le 23 décembre 2005 entre ce dernier et les syndicats, pour opérer une différence entre les jours de repos hebdomadaires et les jours non travaillés par les salariés à temps partiel du fait de la répartition de la durée de travail, afin de ne pas leur faire bénéficier des jours de repos compensateur, quand le jour férié coïncide avec un jour qui ne peut être considéré comme jour de repos hebdomadaire ; qu’il considère qu’une telle interprétation est illicite ;

Attendu que pour conclure au rejet de la demande du salarié tendant à l’octroi de ces jours de repos compensateurs au titre de jours fériés, la F.C.E.S soutient :

‐ que selon l’article 15‐3 de l’accord collectif relatif à l’aménagement et à la réduction du temps de travail , lorsque le jour férié coïncide avec un jour de repos hebdomadaire, une compensation des jours fériés est accordée aux agents ;

‐ qu’au regard des dispositions de la loi no 2004‐931 du 4 mai 2004, un accord d’entreprise, dans les cas qu’elle prévoit, peut comporter des clauses dérogeant à celles des conventions de branche ou accords professionnels ou interprofessionnels, sauf si cette convention ou cet accord en dispose autrement ;

‐ que l’accord du 23 décembre 2005 pouvait ainsi déroger en tout ou en partie, notamment en précisant que pour bénéficier de l’indemnité compensatrice, le jour férié devait coïncider avec un jour de repos hebdomadaire ;

‐ qu’il en résulte que dans l’hypothèse où le jour férié coïncide avec un jour non travaillé par le salarié à temps partiel, celui‐ci n’a pas droit à l’indemnité compensatrice ;

Mais attendu qu’aux termes de l’article 45 de la loi du 4 mai 2004, la valeur hiérarchique accordée par leurs signataires aux conventions et accords conclus avant l’entrée en vigueur de cette loi, demeure opposable aux accords de niveaux inférieurs ; qu’il en résulte qu’un accord collectif d’entreprise, même conclu après l’entrée en vigueur de cette loi, le 6 mai 2004, ne peut déroger par des clauses moins favorables à une convention collective de niveau supérieur conclue avant cette date, à moins que les signataires de cette convention n’en aient disposé autrement ;

qu’en l’espèce, la disposition de l’article 15‐3 de l’accord collectif du 23 décembre 2005 est moins favorable pour le salarié à temps partiel que celle de l’article 11.01.3.2 de la convention collective nationale des Établissements Privés d’Hospitalisation, de Soins, de Garde et de Cure à but non lucratif, du 31 octobre 1951, dans la mesure où elle exclut du bénéfice du jour de repos compensateur les salariés à temps partiel qui n’étaient pas, durant le jour férié, en repos hebdomadaire, alors que l’article 11.01.3.2 faisait bénéficier les salariés à temps partiel de ce jour de repos compensateur toutes les fois que ce jour férié coïncidait avec

un ‘jour de repos’ ; que la convention collective ne prévoyant pas qu’un accord collectif d’entreprise puisse comporter des stipulations dérogeant à celles qu’elle prévoit, les dispositions de l’article 15‐3 de l’accord du 23 décembre 2005 ne sont pas opposables à Franck X… ;

Attendu ensuite qu’aux termes de l’article 11.01.3.2 de la convention collective, intégré dans le contrat de travail de Franck X…, les salariés ayant dû travailler un jour férié ou de repos ce jour‐là (jour férié coïncidant avec un jour de repos) bénéficieront‐ chaque fois que le service le permettra‐ d’un jour de repos compensateur lequel devra, en principe, être pris dans le délai d’un mois ;

que la FEHAP, dans une circulaire du 1er février 1997, énonce que les dispositions conventionnelles sont applicables aux salariés à temps partiel, au prorata de leurs temps de leur temps de travail, et qu’ils ont donc droit au bénéfice du repos compensateur, même lorsqu’ils sont de repos du fait qu’ils travaillent à temps partiel ;

qu’elle a confirmé cette interprétation de l’article 11.01.3.2 dans sa recommandation patronale du 4 septembre 2012, entrée en vigueur à compter du 2 décembre suivant‐ recommandation qui rappelle que les salariés recrutés avant le 2 décembre 2011 ont droit aux avantages individuels acquis et que les anciennes dispositions de la convention collective relatives au régime juridique des jours fériés perdurent au titre de ces avantages‐ en énonçant que ‘lorsque le chômage du jour férié n’est pas possible, les salariés bénéficient d’un repos compensateur’ et qu’il en va ainsi’ lorsque le salarié ne travaille pas le jour férié en raison de son planning (jour non travaillé compte tenu de la répartition de son temps de travail…)’ ;

Attendu dès lors qu’au regard de l’interprétation de cette disposition par la FEHAP, fédération d’employeur signataire de la convention collective, et des dispositions de l’article L.3123.11 du code du travail, il y a lieu d’interpréter les dispositions de l’article 11.01.3.2 en ce sens que le salarié à

temps partiel a droit à un jour de repos compensateur, toutes les fois que le jour férié coïncide avec un jour non travaillé en raison de la répartition de la durée de son travail ;

qu’étant constant que les mercredis14 juillet 2010, 1er mai, 8 mai, 25 décembre 2013 et 1er janvier 2014, Franck X… n’a pas travaillé du fait que son planning ne le prévoyait pas, il y a lieu en conséquence de condamner la F.C.E.S à lui faire bénéficier des jours de repos compensateurs afférents à ces jours fériés ;

Attendu que le fait pour la F.C.E.S de n’avoir pas accordé à Franck X… ces jours de repos compensateurs, alors qu’ils lui sont du à titre d’avantages individuels acquis, lui a nécessairement causé un préjudice qui sera réparé par l’allocation d’une somme de 500 € ;